Sur le pont de Bongolo, nous sommes à la jointure entre 4 quartiers de la commune de Kalamu: Kauka, Kimbangu, yolo nord et Matonge.
4 quartiers veut dire 4 types des hommes, 4 conceptions de la vie, 4 types des pensées, 4 modes de vie.
– le gars de Kauka lui est un descendant des agents du chemin de fer de la SCTP, ex Onatra.
S’il peut compter sur la parcelle familiale don de cette entreprise mourante, il s’y perd à force de chômage et des arriérés salariaux. Il aurait pu survivre avec le sable de la rivière Kalamu mais là aussi le sable jaune autrefois est devenu noir. Donc invendable.
Il se contente de regarder les véhicules passés sur Bongolo.
Il se rince l’œil à chaque passage de mini jupe.
De ses yeux rougi par le Aguène local, il contemple les cuisses jaunies de ses damoiseaux qui font le va et vient entre Yolo et Kauka.
L’opération likofi a éventré sa petite criminalité.
N’ayant aucune ressource, il s’adonne au jeu des cartes et au pari sportif.
Il gagne le peu qu’il lui permet de survivre et surtout de prendre un jus avec Niclette, sa dulcinée.
En fait, elle est dulcinée de tout le monde. Elle doit aussi vivre et faire vivre ses deux fils Taylor.
Et pourtant elle n’a que 19 ans mais déjà deux gosses.
Rien n’étonne quand tout étonne.
Kauka n’est il pas Jobourg ?
Malheureusement, Niclette doit se contenter ce soir d’une séance contre mur.
Le pauvre Robin de bois n’a perçu que 1000 fc de la journée. Pour éviter des dépenses inutiles, les deux tourtereaux vont préféré communiquer adosser à un mur lézardé du tunnel de l’avenue des marais malgré les odeurs nauséabondes du caniveau béant.
Question de préserver les 1000 fc pour un lendemain plus souffrant encore.
– Le gars de Matonge lui ne sait aucune illusion.
Il squatte un petit studio de 1m sur 1 qui faisait office de cave chez ses parents.
Sa mousse en chiclet et son seul héritage vivant qu’il peut laissé à ses 3 gosses obtenus par manque des frais d’avortement. Ces derniers sont élevés par les familles de leurs mères respectives à Kindele, à Kimbwala et à Buadi. Les seules catégories des femmes qui ne se sont pas aperçus de la supercherie du gars de litonge.
Il fait croire à tout le monde qu’il est ancien de Viva la Musica de Papa Wemba. Et pourtant la seule fois qu’il a chanté c’était le jour de son baptême à la paroisse Saint Joseph en 1982.
Ne suivez pas sa coiffure Tintin comme Reddy Amisi.
Il prépare toujours son coup pour chaque soir en s’asseyant près du pont Kalamu. Il drague ces jeunes filles et dames qui viennent du marché Gambela pour acheter des oranges, mangues ou cacahuètes à vendre. Il leur paient les fameux 500 fc de transport pour leur permettre de joindre Kingasani en prenant soin de leur donner son numéro de phone.
Ces pauvres dames tombent facilement sous les Charmes de ce Wemba de pacotille.
Il n’a que 1500 fc dans sa poche qu’il gagne après une vaste opération de quémande auprès des vieux et petits du quartiers.
Mon gars puis je avoir un 100 ou 200 fc?
Économiste invétéré, il en arrive à 1500 fc à force de patiente et d’humiliation.
Lui, il n’a que faire de l’honneur. Il a perdu le jour où il a abandonné les études pour devenir musicien. Quel musicien? Seulement dans la douche lorsqu’il est emporté au zénith de la masturbation laissant au passage des pauvres têtards erraient ça et là sur le pavé dévasté de cette douche à saut plastique.
Le soir rendez vous dans les maquis construits près de la rivière. Ici c’est à la fois bistrot et hôtel en plein air.
Il a deux espaces : le premier où il y a une lampe ici une bouteille de jus coûte 1000 fc et le lieu très saint tout noir. Ici la bouteille est revue à la hausse: 1500 fc. Ici, seul le barman a le droit d’allumer son phone pour percevoir l’argent de consommation.
Sodome et Gomorrhe sont plus sanctifiées que Lourdes et Bénarès.
Des enfants sont conçus ici à la belle étoile dans des positons des trapézistes. Ces maquis s’étalent à perte de vie et déjà vers 19h00 des filles de joie se mettent à leur devanture sollicitant les passants y compris le gosse de 12 ans qui habite juste en face et qu’on a envoyé juste au coin acheté une chickuangue et un croupion de dinde. Et là, il voit effectivement un croupion pas celui d’une dinde mais de dandine. Celle là même qui est venue une fois ici avec sa sosie de wemba qui lui a fait faire 3 enfants et qui s’est perdu dans la nature.
Elle a préféré revenir au lieu de crime avec une nouvelle profession: le plus vieux métier du monde. Et dire que ses lèvres écailleuses ne supportent plus le rose à lèvre.
Heureusement pour elle, les candidats n’aiment pas trop le bouche à bouche. On est pas à alerte à Malibu. La rivière Kalamu n’a pas des plages mais des montagnes d’immondices.
– Le gars de Kimbangu lui n’a de Simon Kimbangu qu’un photo polycopiée du prophète. Quand au reste, il est plus proche de Barabbas.
Il occupe une maison abandonnée par les vrais proprios pour cause d’inondation.
Il n’est pas seul, ils sont à peu près 12 personnes. Ils utilisent les deux espaces non inondées les deux chambres qu’ils doivent atteindre à partir d’un plancher posé à l’entrée. Le salon devenu une piscine à têtards et à des herbes aux noms scientifiques inconnus. Un vrai bouillon de culture.
Koch s’y sentirai à son aise.
Métier présent et d’avenir : Kuluna.
Dans la journée, la cour se transforme en fumoir. De loin, on y aperçoit de la fumée qui s’élève comme à la place Sainte Pierre de Rome.
Sauf qu’ici, aucun pape ne sera désigné mais un homme ou une femme s’en sortira avec beaucoup de chance avec des entailles des machettes au bras, au dos ou à la jambe. Il perdra aussi son portable, son sac ou sa porte monnaie emporté par l’un de ses Zepekenio kinois.
Le mieux lorsqu’on le croise la nuit et de dire: ” prends tout mais ne me faite pas du mal.”
Là vous aurez plus de chance que votre bras ne sert pas de test de boucherie.
Et tu te complaira après la perte subie à remercier encore ton agresseur: merci Shina Rambo, merci général Dakota, etc. Des noms ramassés dans les films violents et d’action qui servent des modèles à ses criminels de bas chemins.
– Le gars, pardon la dame de Yolo nord se réveille très tôt le matin et brosse dans la rue avec un pagne qui cache seulement les seins et une partie des postérieurs mais qui laissent transparaitre des formes arrondies loin de la géométrie euclidienne.
Une vraie invitation aux âmes perverses et débauchées.
Sans prendre son bain, elle se met dans la rue et demande de l’argent à tout vent aux passants:
” yaya Kabela nga 500 fc.”
Si tu as le malheur de sortir ta porte monnaie, elle passe au plan B. Elle vient te coller sur la chemise et crie à gorge déployée que t’es sortie avec elle sans lui payer.
Par peur du ridicule, tu paies le montant qu’elle demande question de garder ta divinité perdant au passage quelques boutons de la seule chemise de la garde robe.
La nuit, elle ne va pas loin. L’électricité ayant fait ses adieux au quartier, elle se blotti sur le mur de la parcelle arborant avec conviction ses deux soeurs montgolfières qui ont déjà perdues de leur entrain à force de malaxage.
Mais t’inquiète même les mangues vertes sont mangées accompagnées du sel. Ici, il faut profiter de tous les avantages que les ténèbres offrent.
Si Mopono comme on l’appelle n’a pas d’âme, il a du moins des jambes qui ne veulent s’écarter.
Le service ici se fait à domicile, chez la Mongando. Pas question de dépenser son argent dans un hôtel. Ici, le service est complet sous l’oeil vigilant du maître de la maison qui est à la fois mari et proxénète.
Il est mongando et dans sa tribu on partage tout y compris sa femme.
Une générosité à toute épreuve sauf au 30 minutes de jouissance. Au delà, le mongando se souvient qu’il est aussi un peuple guerrier.
Le pont Bongolo contemple sans broncher ses multiples passants, ses véhicules bondés allant ou venant de Tshangu, ses Wewa triomphant de la Victoire de l’un de leurs à la présidence.
Chacun ayant son histoire, ses problèmes dont mêmes les odeurs des animaux en putréfaction sous le pont ne pourront sortir de la torpeur.
L’eau de la rivière Kalamu dévalant le pont malgré les multiples bidons en plastique qui s’y entassent.
Elle a tant des histoires à raconter, tant des misères à charrier, etc.
Par Bishop Mfundu