Accoucher relève du parcours de combattant pour les femmes enceintes du village Ngamanzo, dans la localité de Kimpoko dans la commune de Maluku à 80 km de Kinshasa. Sans un dispensaire ou une pharmacie où recourir en cas de problème de santé,
elles sont contraintes de marcher jusqu’à la maternité des Sœurs de ” Kingasani ya suka “, dans la commune voisine de Kimbanseke. 50 kilomètres difficiles à parcourir dès lors que cette partie de la capitale ne dispose pas d’un transport en commun et les femmes prêtes à donner vie font face à l’insécurité ambiante due au manque d’électricité que connaît cette municipalité urbano-rurale.
Pour les femmes de Ngamanzo voir son propre enfant entrain de faire un premier pas constitue une joie immense pour la mère. ” C’est vrai que nous sommes dépourvus, mais quand nous voyons notre enfant grandir, cela nous procure une joie immense “, explique un couple habitant un hangar construit des feuilles de palmier. Les enfants sont une source de joie pour les femmes de Maluku privées des droits élémentaires. ” Nous n’avons pas d’hôpital, les femmes vont jusqu’à Kingasani pour accoucher “, relate une habitante du coin qui ne comprend pas pourquoi l’Etat ne pense pas à doter ce coin de Kinshasa d’une maternité.
Non seulement qu’elles vivent dans la précarité, mais en plus les femmes de Ngamanzo n’observent pas les instructions médicales sur la naissance des enfants. Voilà ce qui les expose aux naissances souvent non désirées. ” Je n’ai jamais eu des enseignements liés à la grossesse “, affirme Sophie P., une jeune mariée expliquant que ” c’est seulement pendant les règles que mon mari ne me touche pas. Pour le reste de fois, je n’ai aucun pouvoir à lui opposer “. ” La nuit tombée, par manqued’occupation, la plupart des couples s’adonnent à cœur joie au sexe. Une manière pour eux de se distraire vu l’absence de lumière “, ironise un de rares pasteurs d’une église de réveil.
INDIFFERENCE DES AUTORITES
La promiscuité dans laquelle vivent les Kinois de Maluku est inacceptable. La quasi-totalité des robinets installés il y a plusieurs années ne procurent pas d’eau à ces parcelles. ” Et pourtant, les autorités nous ont promis de l’eau pendant la campagne des élections de 2011, mais depuis on ne voit aucun de nos élus “, regrette Séraphin implorant la miséricorde de l’Eternel pour sortir de ce calvaire. Comme dans l’antiquité, à Maluku, on recourt encore aux eaux des puits à la manière des paysans. ” Les habitants de Maluku ne sont pas considérés. Beaucoup de nos autorités viennent et repartent sans résoudre les problèmes auxquels nous faisons face “, ajoute un pêcheur.
UNE LOCALITE DECONNECTEE
Vivre à Maluku, c’est se déconnecter totalement du reste de la capitale Kinshasa. Sans électricité, ces périphéries de la capitale congolaise ignorent totalement ce qui se passe dans la ville et au pays. L’absence de courant électrique est aussi la raison principale de manque de modernisme à Maluku où les femmes ménagères sont incapables de conserver leurs nourritures. ” Dès 18 heures, la vie s’arrête chez nous. Nous sommes obligés de nous enfermer dans nos maisons en paille. La seule distraction, c’est le sexe pour nous les mariés “, relate Dozi, la trentaine révolue.
MODERNITE : UN SLOGAN
Sans eau potable, ni courant électrique, la ” Révolution de la modernité ” prônée par le Chef de l’Etat demeure juste un slogan creux dans les périphéries de la capitale congolaise. ” On ne connaît pas tout ce que vous racontez. Sans courant, comment voulez-voulez que nous suivons la télévision ? “, répondent t-ils à la question de savoir si ils sont au courant des travaux de modernisation amorcés par le Gouvernement.
Dépourvus de tout modernisme, les habitants de Maluku ont un seul souci : être dotés de tôles pour couvrir les toits de leurs maisons. ” Vu la difficulté, nous sommes incapables de couvrir nos maisons avec. C’est pourquoi, vous remarquerez les pailles dans la plupart de toitures ” fait savoir une habitante de Maluku tout en affirmant que pas mal de maisons connaissent des incendies parce qu’utilisant des lampes traditionnelles.
Il est vrai que les autorités du pays ne pourront pas résoudre dans l’immédiat l’ensemble des problèmes auxquels ces concitoyens sont confrontés. Mais, à Ngamanzo, l’adduction d’eau potable, la construction d’un dispensaire pour les soins de santé demeure une urgence à laquelle aucun dirigeant ne peut se soustraire. Seul moyen de permettre à ces ” autres Kinois ” de vivre dans des conditions humaines en attendant le jour meilleur.
Rachidi MABANDU
Source : Forum des As