RDC, Incursion du M23 dans l’Est: Kinshasa accuse, Kampala dément

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Président Kabila et Museveni

Cantonnés en Ouganda depuis leur défaite en 2013, des rebelles de l’ex-M23 ont refait surface. La confirmation est du gouverneur du Nord-Kivu. Julien Paluku est allé plus loin, indexant Kampala de soutenir ces ex-rebelles. Kinshasa n’a pas tardé à réagir, saisissant à l’occasion le Mécanisme de suivi de la CIRGL pour tirer au clair cette affaire. Entre les deux voisins, c’est le jeu de ping-pong. L’un accuse, l’autre dément, catégoriquement.

Revoici les rebelles de l’ex-M23. Dans un message largement diffusé sur les réseaux sociaux, le gouverneur de la province du Nord-Kivu, Julien Paluku, a été le premier à donner l’alerte en faisant état d’une nouvelle incursion des rebelles de l’ex-M23 dans les collines du Nord-Kivu, à la frontière avec l’Ouganda.

« Alerte!!Rouge!!!!! À partir de l’Ouganda, les ex-M23 sont en direction de la RDC avec armes et minutions pour attaques généralisées », a écrit Julien Paluku dans l’un de ses tweets. Il est allé plus loin en nommant certains leaders de l’ex-mouvement rebelle qui seraient aperçus dans cette nouvelle incursion. « Les hommes identifiés dans la machine meurtrière : Makenga, Mboneza, Jean-Claude Sejinshi, Emmanuel Kabundi », a laissé entendre le gouverneur du Nord-Kivu dans un autre tweet.

Défaits en 2013, après une grande offensive menée par les Forces armées de la RDC, appuyées par les troupes des Nations unies, les militaires de l’ex-M23 s’étaient dispersés entre le Rwanda et l’Ouganda. Mais, la plus grande concentration de ces ex-rebelles était cantonnée en Ouganda dans un camp de réfugiés. Voilà trois ans qu’on ne parle plus de l’ex-M23, et ce, jusqu’à l’alerte lancée par Julien Paluku.

A Kinshasa, les réactions ne se sont pas fait attendre. Dans la capitale, les autorités sont convaincues qu’environ 200 ex-rebelles du M23 ont traversé la frontière avec l’Ouganda le week-end à hauteur de la localité d’Ishasha, dans la province du Nord-Kivu.

Jeu de ping-pong

Sans les nommer de manière explicite, Lambert Mende, porte-parole du gouvernement, a reconnu la présence des ex-rebelles M23 dans la partie Est de la RDC. Il a fait savoir à l’AFP que les Forces armées de la RDC se battaient encore dimanche « contre ces personnes (Ndlr : les ex-M23) venues de l’Ouganda et qui normalement devaient se trouver en Ouganda sous la responsabilité des autorités de ce pays ».

Plutôt réservé, le ministre congolais de la Défense, Crispin Atama Tabe, a préféré se référer au Mécanisme conjoint de vérification élargi de la CIRGL (Conférence internationale sur la région des Grands Lacs). Dans une lettre adressée le 15 janvier 2016 au commandant de ce Mécanisme, Crispin Atama demande à ce dernier de « bien vouloir procéder de toute urgence à la vérification des informations me parvenues, faisant état de l’infiltration de +/- 180 éléments ex-M23 qui auraient quitté l’Ouganda dans la nuit du 14 au 15 janvier 2017 en direction du territoire de Rutshuru en République démocratique du Congo, en passant par Ishasha ».

Si le ministre de la Défense n’a pas nommément cité l’Ouganda, à Kinshasa, on voit derrière cette nouvelle incursion la main invisible de l’Ouganda où étaient cantonnés depuis 2013 les ex-rebelles du M23. Tout de suite, les autorités ougandaises n’ont pas tardé à balayer d’un revers de la main les allégations portées contre elles par les autorités congolaises. D’un ton sec, le ministre ougandais des Affaires étrangères, Henry Okello Oryem, n’a pas fait dans la dentelle. « Le fait que l’Ouganda armerait ou autoriserait les rebelles du M23 à se baser ici (en Ouganda) pour déstabiliser la RDC est le fruit de leur imagination. Pourquoi l’Ouganda devrait armer les rebelles du M23 ? », s’est-il indigné, dans une  déclaration reprise par AFP.

Le porte-parole de l’armée ougandaise, le commandant Henry Obbo, a abondé dans le même sens, sans toutefois en exhiber la preuve, pour indiquer que les ex-rebelles se trouvaient toujours, depuis leur arrivée en 2013, dans le camp de l’armée ougandaise de Bihanga, à 320 km à l’Ouest de Kampala.

Entre Kinshasa et Kampala, qui dit vrai ? La question taraude les esprits. Au moment où, au niveau du gouvernement, on joue plutôt à la prudence, craignant de ne pas offusquer ce grand voisin,  l’opinion publique dans la capitale se perd en conjectures.

Il faut cependant reconnaître que, depuis sa déroute en 2013, le M23 reste un mystère. Cette question est entourée d’un flou artistique que Kinshasa est incapable d’élucider. En décembre 2013 à Nairobi (Kenya), un accord a été signé entre l’ex-M23 et Kinshasa, ouvrant des perspectives pour le rapatriement de la plupart des combattants de l’ex-mouvement rebelle en RDC.  Selon les dernières estimations du Mécanisme conjoint de vérification de suivi élargi, à ce jour, seuls 193 militaires ex-M23 auraient été rapatriés en RDC. Le grand nombre, dont le chef militaire Sultani Makenga, se trouverait encore entre le Rwanda et l’Ouganda.

En ce qui concerne de possibles incursions des ex-M23 en RDC, on n’est pas à la première révélation. Toutes ces révélations sont généralement restées sans suite. En sera-t-il encore le cas de celles lancées le week-end dernier par Julien Paluku ? wait and see.

A Kinshasa, les autorités attendent plutôt la réponse du Mécanisme conjoint de vérification élargi de la CIRGL pour sans doute une ligne de défense face à ce qui paraît comme une énième agression venue encore et toujours de l’Ouganda.

Avec le Potentiel

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